28 décembre

Les vagues éclatent le paysage sonore de la Bretagne fatiguée. Elles se fracassent contre les galets de l'anse, elles défilent en lignes brèves et parallèles ; frontières d'ombres où le soleil s'arrête.

Je lève le front pour observer la lente explosion des couleurs qui s'échappent. Le ciel s'habille d'un orange éblouissant sur lequel se découpe la falaise. Le rose du granite fuit pour le redéfinir, violet dans la nuit.

Curieusement, le bruit des moteurs me semble plus naturel que le beat incessant de la mer. Elle rage de ne pas pouvoir nous avaler, elle hurle sa colère dans des oreilles dont les tympans ont cessé tout fonctionnement.

Perché près de la chute, je me suis égaré pour l'écouter.

Je suis heureux d'en être. Heureux de pouvoir me dire dans mon individualité que je suis de ceux là. De ceux qui, malgré le froid, sont venus perdre le temps de la ville pour savourer les minutes crépusculaires.

Mes baskets poussent lâchement des graviers dans le vide, une erreur et je les suis. Dans mon habit de fourmi ouvrière, je regrette de ne pouvoir encore en faire plus. Alors à chaque voiture qui dynamise ma nuque, c'est un mot que je lâche. A chaque lumière qui s'affirme dans la ville, un adjectif que j'appose.

Mon téléphone est beaucoup de choses, mais perdu entre les genêts, c'est une boîte à paroles. Une conversation que j'envoie à l'incertitude, au hasard : je ne sais où elle finira.

Comme les nuages de buée qui s'échappent de ma bouche - chaleur que je perds face à l'absurdité de notre situation - peut être ce moment se dissipera t-il dans l'immensité de ce que nous ne discernons pas.

Rage à ma peau, la nuit creuse mes doigts : je quitte cette pierre. De loin, la bruyère à l'air tellement plus humaine que moi.